Les premières enquêtes de Kogorô Akechi

Tome 1 :L'Assassinat de la Rue D


L'épouse du bouquiniste était une vraie beauté, et ce en dépit des marques de coups qui coloraient régulièrement son corps. Elle n'était cependant pas du goût de tout le monde, puisque quelqu'un a décidé de la faire disparaître du paysage. Le gentil petit jeune homme qui lui servait de mari cacherait-il un tempérament violent sous ses airs placides ? Seulement, il ne se trouvait pas chez lui le soir du crime. Assis dans le café d'en face, deux jeunes gens passionnés d'enquêtes policières n'ont rien manqué du drame, à ceci près qu'il n'y avait rien à voir : personne n'est entré dans la librairie, personne n'en est sorti, seule une lumière s'est éteinte tandis que se refermait la grille d'un panneau coulissant. Face à la police dépassée, les deux détectives amateurs, le narrateur et son excentrique ami Akechi, vont chacun tenter de résoudre à leur manière cette affaire digne du « Mystère de la Chambre Jaune »....Vu son succès grandissant, les éditeurs de Ranpo Edogawa lui avaient demandé de créer un personnage de détective récurrent. Ainsi naquit Kogorô Akechi, dont c'est la toute première apparition dans cette histoire. Seulement, avant de devenir l'archétype du gentleman détective que nous connaissons, ici il n'est encore qu'un jeune original qui ne paye pas de mine avec sa chevelure ébouriffée et son vieux kimono à rayures.Voici pour la première fois en français ses toutes premières enquêtes.Le Fantôme : Si M. Hirata, homme d'affaires, jouit désormais d'une confortable fortune, celle-ci n'a pas toujours été bâtie sur des moyens légaux. Nombreux sont les gens qui veulent sa peau, en particulier Tsujidô, un vieux mafieux aussi dangereux que coriace. À la mort du vieux fou, M. Hirata pense enfin pouvoir respirer à son aise. Jusqu'à ce qu'il reçoive une lettre posthume, prélude à d'inquiétantes manifestations. Alors qu'il est sur le point de perdre la raison, sa route croisera par hasard celle d'un énigmatique jeune homme...... Une enquête que n'aurait pas dénigré Flaxman Low, le détective de l'étrange.Qui : Si les chats pouvaient parler, Hisamatsu dirait qui a tiré sur Hirokazu Yûki, le fils du général. C'est en tout cas ce que pense l'inspecteur Hatano, appelé sur les lieux du crime, en se retrouvant face à un bien étrange cambriolage. Hirokazu passait les vacances d'été au bord de la mer, à la résidence cossue de ses parents, en compagnie de sa belle cousine et ses deux meilleurs amis. Ce devait être de merveilleuses vacances, les dernières avant son entrée à l'armée. S'il a réchappé à la mort, le voilà désormais infirme pour le restant de ses jours. Bien décidé à confondre celui qui a bousillé sa vie, aidé du narrateur, son ami Matsumura, il va donc s'efforcer de mener lui-même l'enquête afin de démêler ce curieux imbroglio. Mais les deux jeunes gens ne sont apparemment pas seuls à vouloir damer le pion à la police. Quoi qu'entreprenne Matsumura, quelqu'un le devance toujours ! Un homme bizarre, ami du général en dépit de son allure dépenaillée, dont tout ce qu'on sait de lui est qu'il est féru d'enquêtes policières et un excellent joueur de go...... Ce court roman, remarqué à l'époque de sa parution pour l'originalité de son mobile, est l'un des rares pour lequel Ranpo Edogawa n'a pas rencontré de problèmes avec la censure.




Tome 2 :Le Promeneur sous les Toits

Saburô Gôda, un jeune original oisif, n'a pour seul intérêt dans la vie que le crime. La peur du gendarme l'empêchant de se livrer pour de vrai à son amusement favori, il se console en lisant des romans policiers, en organisant des simulacres, ainsi qu'en écoutant son ami Akechi lui conter les prouesses des grands criminels de l'époque. Quand le hasard lui fait découvrir un passage vers les combles de sa nouvelle pension, aussitôt Saburô voit là l'opportunité de se distraire en espionnant ses voisins, leur face cachée, leurs travers.... Mais une nuit, sa promenade sous les toits le conduit au-dessus de la chambre de la seule personne au monde qu'il ne peut pas souffrir : Endô, le bellâtre de la pension, un vrai pousse-au-crime avec ses vantardises ! Ce serait presque faire œuvre utile en le supprimant.... De toute façon, qui aime les dentistes ?
Deux autres nouvelles sont au menu de ce recueil des enquêtes de jeunesse du détective Kogorô Akechi : « Le Test Psychologique », présenté ici dans une nouvelle traduction, ainsi que « Le Gang de la Main Noire », qui voit le retour du narrateur de « L'Assassinat de la Rue D ».





Le nain

La nuit a jeté son voile de ténèbres sur le parc d'Asakusa. En ces heures vides, le jardin public cesse d'être un lieu d'amusement pour devenir le refuge des vagabonds, des voleurs, des racoleurs et des marginaux de tous poils. Absolument tout peut arriver lorsqu'on s'engage imprudemment dans ses méandres. Tout, mais certainement pas ce à quoi s'attendait Monzô Kobayashi, jeune chasseur de bizarre, lorsqu'un nain fait accidentellement tomber un bras de femme à quelques pas de lui ! N'écoutant que son courage, Monzô le suit. Le lendemain matin, l'aventure qu'il a vécue lui semble si irréelle que le jeune homme se demande même s'il n'aurait pas rêvé. Mais quand il apprend par hasard qu'un autre membre humain a été retrouvé dans la nature et que Michiko, une adolescente de sa connaissance, s'est mystérieusement volatilisée, il craint soudain le pire.
Afin de venir en aide à la jeune belle-mère de Michiko, la sublime Mme Yamano qu'il aime en secret, Monzô s'empresse de reprendre contact avec un ancien camarade de pension, qui n'est autre que Kogorô Akechi. Après deux années passées en Chine qui lui ont valu la consécration, le célèbre détective amateur est enfin de retour au Japon, bien décidé à tirer un trait sur les enquêtes pour passer à autre chose. Ce qu'il n'avait pas prévu, c'est qu'il s'ennuierait à mourir ! Heureusement, l'étrange affaire que vient lui apporter Monzô contient tous les ingrédients d'une enquête retorse à souhait.
Ce récit est le deuxième roman de Ranpo Edogawa, juste après « L'île Panorama » rédigé quasi-simultanément. Sa parution en feuilleton débuta en 1926 dans le journal « Asahi Shimbun », Rampo ayant entrepris de remplacer au pied levé l'écrivain Yûzô Yamamoto, en congé maladie. Nullement habitué au rythme et aux exigences de ce type de publication, il ne fut jamais totalement satisfait de son roman, n'ayant pu travailler sur le texte autant qu'il l'aurait voulu. Avec sa séquence d'introduction remarquable et ses multiples scènes surréalistes, l'œuvre rencontra cependant un énorme succès, qui lui valut d'être adaptée quatre fois au cinéma, dont trois du vivant de l'auteur.





Tome 4 :Le Vampire

Tout homme serait prêt à mourir pour Shizuko Yanagi ! C'est d'ailleurs ce que s'apprêtent à faire Fusao Mitani, jeune homme pauvre au physique d'Adonis, et Michihikkada, artiste-peintre excentrique au visage chevalin. Dans l'auberge de la station thermale où le trio s'est rencontré, les deux soupirants se défient lors d'un étrange duel anachronique : dans leur verre, du poison ; celui qui survivra gagnera le cœur de la belle. Le courageux Mitani remporte finalement l'affrontement ; quant à son rival, il prend la fuite, n'ayant pas le courage d'aller jusqu'au bout et de se suicider.
Pourtant, peu de temps après, un corps défiguré est retrouvé dans la rivière, vêtu du kimono du disparu. Simultanément, un mystérieux client fait son apparition à l'auberge, alimentant les ragots du personnel par son physique aussi sinistre qu'insolite. C'est le début de l'enfer pour Shizuko. Qui est donc cet homme sans lèvres, véritable squelette ambulant, qui s'acharne sur elle et semble lui vouer tant une haine qu'une passion farouches ? Monstre, revenant ou criminel bien réel ? Bientôt appelé à la rescousse, Akechi Kogorô aura fort à faire entre courses-poursuites, faux-semblants et suspects plus retors les uns que les autres !

De son vrai nom Hirai Tarô, Ranpo Edogawa est né le 21 octobre 1894, sous l'Ère Meiji. Après avoir terminé ses études, il entre dans la vie active en changeant sans arrêt de travail jusqu'à l'écriture de son premier récit, Nisen Dôka (« La pièce de deux sen »), en 1923, qui marquera le début de sa carrière littéraire. Intéressé par la logique, il fait souvent allusion dans son œuvre à Sherlock Holmes, Arsène Lupin, Vidocq, mais c'est surtout un grand admirateur d'Edgar Poe. Ses récits mêlent ainsi subtilement enquêtes policières et ambiance fantastique, ponctués d'éléments macabres ou érotiques. Même si chez lui les crimes les plus étranges finissent toujours par être expliqués de manière rationnelle, cette atmosphère glauque où l'ancien côtoie la modernité, où le Japon traditionnel côtoie un mode de vie à l'occidentale, revêt chaque récit d'un charme envoûtant.