HISTOIRES DE FREAKS : L'EXTRAORDINAIRE CASTING DU FILM DE TOD BROWNING
Blandine Etienne - 14 février 2018
1932. Tod Browning a pour mission de concurrencer les films d'épouvante Universal pour le compte de la MGM et réalise Freaks avec de véritables phénomènes de foire, aux physiques et aux caractères impressionnants comme leurs destinées. Familier de l'univers du cirque, dans la vie comme dans son œuvre, le cinéaste est dans son élément. Il signe un témoignage exceptionnel sur l'univers des freaks et leur quotidien hors piste. Et un film unique dans l'histoire du cinéma, d'emblée controversé. Le plateau de tournage est déserté par les employés du studio, terrifiés, et les vedettes de la monstrueuse parade, quasiment toutes privées de cantine.
Focus sur le casting le plus sensationnel et le plus bouleversant du monde qui vaudra à Freaks un échec critique et public retentissant lors de sa sortie.
HARRY EARLES (1902 – 1985)
Du haut de ses 11 ans, Kurt Schneider débute sur scène en Allemagne dans Hansel and Gretel (1914) avec sa sœur aînée Frieda. Ils sont repérés par un américain, Bert W. Earles, qui les produit à travers les États-Unis sous les noms de Harry et Gracie Earles.
Harry fait ses premiers pas au cinéma sous la direction de Tod Browning dans The Unholy Three (Le Club des trois, 1925) où il incarne le gangster Tweedledee. Rebelotte dans la version parlante de Jack Conway (1930). Habitué des studios, l’acteur a 14 films à son actif, et notamment une poignée de courts burlesques : on le voit dans la série des Our Gang (future Little Rascals) chez Hal Roach, en tête d’affiche chez William Beaudine dans le rôle d’un bébé (That’s My Baby en 1926), et souvent aux côtés de Laurel et Hardy. Mais sa filmo compte presque autant de participations non créditées. Freaks lui offre le rôle le plus important de toute sa monstrueuse parade : Hans, le lilliputien, manipulé par la superbe trapéziste Cleopatra et son bien nommé Hercule qui convoitent la fortune dont il vient d’hériter… Harry Earles aurait lui-même suggéré à Tod Browning le livre de Tod Robbins, Spurs, dont le film est tiré.
Avec une taille de 99 cm et un accent germanique prononcé, il forme avec ses trois sœurs atteintes du même nanisme hypophysaire, dit proportionnel ou harmonieux, The Doll Family – alias The Dancing Dolls (à la mort de leur manager, la fratrie troque le patronyme de Earles contre celui de Doll). Après Freaks, son dernier vrai rôle, Harry vient gonfler le staff des Munchkins du Magicien d’Oz (1939) et préfère continuer à se consacrer aux tournées en famille. Les quatre frère et sœurs vivent et travaillent ensemble, avant de mener une retraite dorée en Floride dans la résidence construite à leur taille, à partir de 1958.
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