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 Abolition : le bourreau a gardé la mémoire juste

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ElricWarrior
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MessageSujet: Abolition : le bourreau a gardé la mémoire juste   Abolition : le bourreau a gardé la mémoire juste EmptyVen 30 Mar - 10:54



«François Mitterrand ? Drôle d'abolitionniste ! J'ai été fort surpris quand il a supprimé la peine de mort. Parce que je l'ai bien connu. A une époque où il était contre le châtiment suprême, mais tout contre...» Fernand Meyssonnier, 75 ans, sait de quoi il parle. De 1947 à 1961, il fut exécuteur des arrêts criminels à Alger. En d'autres termes et pour le grand public : bourreau de la République. Aujourd'hui retiré à Fontaine-de-Vaucluse, le vieil homme se souvient : «François Mitterrand fut garde des Sceaux de février 1956 à juin 1957, pendant ce qu'on appelait pudiquement les ''événements d'Algérie''. Lors de son passage, il y eut quarante-quatre décapitations et peu de grâces accordées. Je le sais : c'est moi qui faisais marcher la guillotine avec mon père.»
«La Veuve», «la Bécane», «la Lucarne» : la machine inventée par le docteur Louis (son confrère Guillotin n'en fut que le théoricien et vulgarisateur auprès de l'Assemblée en 1791) fut la grande affaire de sa vie. A son actif, 200 exécutions. Dont la première à l'âge de 16 ans, en tant que «bénévole». Un précoce, le Fernand. Il faut dire que l'environnement familial était propice au développement de cette vocation. Certes, il aurait préféré être «danseur de ballet». Mais, à la maison, on penchait plus vers Thanatos que vers Terpsichore. Son père, Maurice Meyssonnier, fut exécuteur de 1928 à 1962. Et son parrain n'était autre que le fameux Henri Roch, surnommé «Monsieur d'Alger», qui officia jusqu'en 1945 (et mourut décoré de la médaille du Travail). Une histoire de famille. Côté Roch, on faisait remonter le premier bourreau au XVIIe siècle !

Dans son salon, le vieux pied-noir me montre la guillotine 1868 en modèle réduit qu'il a fabriquée et offerte à son père à l'occasion d'un anniversaire. «Je n'avais que 14 ans, commente-t-il. Mon père était très fier.» Comment devient-on bourreau ? Pour comprendre, il faut lire son livre, Paroles de bourreau (éditions Imago, 2002). Passionnant. Même si Fernand Meyssonnier prétend aujourd'hui que certains de ses propos ont été tronqués par l'universitaire sociologue ayant recueilli ses souvenirs : «Il me fait dire que je suis contre la peine de mort. C'est faux. J'y suis toujours favorable pour les crimes de sang, commis sur les enfants ou les vieillards.» S'estimant floué, il refuse d'encaisser les droits d'auteur : «J'en fais don à l'Iile, Institution des invalides de la Légion étrangère.»

La routine de la mort
Ces chicayas n'enlèvent rien à l'unicité du témoignage. D'où il ressort qu'on peut exercer un métier anormal tout en étant normal. Car le sieur Meyssonnier n'a rien du sadique ou du psychopathe, n'en déplaise aux adversaires de la peine capitale. Sa description des faits est clinique : «Pour la guillotine, il faut être quatre : l'exécuteur en chef, qui actionne le levier (mon père), deux adjoints qui ligotent le condamné et le basculent sur la machine, et enfin celui qu'on appelle ''le photographe''. Moi, j'étais ''photographe''. Devant la lunette, les doigts placés derrière les oreilles du type, je devais le tirer vers moi pour qu'il ne se rétracte pas soudainement. C'est une position dangereuse : on peut se faire couper les doigts. La lame tombe de 2,35 mètres et pèse 40 kilos (l'équivalent de 700 kilos à l'arrivée). C'est moi qui disais ''Vas-y !'' à mon père quand j'étais prêt. Tout se jouait en un éclair.»

Le plus étonnant dans son récit, c'est la nature des motivations : «Personne n'est obligé de remplir les fonctions d'exécuteur. C'est en toute conscience qu'on fait ce choix. Nous étions des auxiliaires de justice. On touchait un salaire niveau smic, plus une prime de risque et une prime de tête, pendant la guerre d'Algérie. Mais chacun avait son affaire à côté : mon père tenait un bistrot, par exemple. En réalité, l'argent ne comptait pas. On faisait ça parce que les exécuteurs étaient reconnus et appréciés en Algérie. Et parce que cela nous apportait un tas d'avantages : port d'armes, transports gratuits, passe-droits auprès de la préfecture, etc.» Aussi simple que ça.

Et qu'on n'aille surtout pas confondre exécuteur et exécutant, tempête Fernand Meyssonnier : «C'est mon père qui fixait le jour de l'exécution, pas la chancellerie. C'était presque toujours le mardi, le mercredi ou le jeudi. Cela l'arrangeait : il tenait à rester au bar du vendredi au dimanche, parce qu'il y avait foule ces jours-là. Même chose lors des déplacements à Constantine ou à Oran. Un jour, le procureur nous annonce six exécutions à faire. Mon père lui dit : ''On en fait trois tel jour, et trois autres le lendemain.'' Cela nous permettait de rester un jour de plus pour voir les amis et faire du tourisme. Idem pour l'horaire : à Alger, mon père exigeait qu'on ait terminé à l'aube, parce qu'il voulait être derrière son comptoir à 6 heures.»

Des remords ou des regrets ? A l'exception de la seule femme qu'il ait décapitée (une empoisonneuse), il n'en conçoit pas :«Au seuil de ma mort, je lis et relis l'historique de ces 200 exécutions : nous suivions tous les procès et j'ai tout conservé. Je reste persuadé que les condamnés étaient coupables, en majorité des terroristes FLN, poseurs de bombes ou auteurs de massacres effroyables. Si j'avais éliminé un innocent, mon existence ne serait qu'un long cauchemar. Je savais qui j'exécutais et pourquoi. Si l'Etat nous a confié cette tâche pénible, c'est parce qu'il avait jugé que nous étions justes, honnêtes et sans haine. Nous avons simplement rempli notre devoir. Aussi, j'assume mes actes.» Et de citer Paul Claudel : «Il n'y a pas de plus grande charité que de tuer des êtres malfaisants.»

Pour les Meyssonnier, comme pour tous les Européens d'Algérie, l'histoire bascule en 1962. Si le fils s'embarque pour Tahiti dès 1961 (un rêve de gosse), le père décide de rester : «La preuve de sa bonne foi ! Oui, lui, l'exécuteur en chef, qui a décapité des militants du FLN, il est resté après l'indépendance. Sa fonction, dont il avait une haute idée, le plaçait au-dessus de la politique.» Ce en quoi il se trompait : dénoncé (par un pied-noir qui avait des vues sur son bistrot !), arrêté, insulté, molesté et torturé par la police algérienne, il en réchappe miraculeusement. Expulsé manu militari «en pyjama et en chaussettes», il mourra deux mois plus tard, à la suite de ces mauvais traitements.

Pour Fernand, qui n'a que 30 ans, une autre vie commence. Mis au chômage technique pour cause d'indépendance algérienne («Non seulement, nous n'avons pas touché d'indemnités mais l'Etat nous doit toujours deux ans de salaire !»), il s'installe à Tahiti. C'est là-bas qu'il rencontre Simone, son épouse actuelle et la mère de sa fille Taina. Après quelques années de vaches maigres et moult jobs, il se lance dans des expériences commerciales aussi étranges que fructueuses : balades en corbillard pour touristes américains, entreprise de désinsectisation, etc. Surtout, il achète un terrain qu'il revendra, vingt-cinq ans plus tard, cent fois sa valeur initiale, à Gaston Flosse, le ponte de la Polynésie !

Passionné d'histoire

En métropole, avec l'argent gagné, il revient à ses premières amours. De Drouot à Christie's, il court les salles des ventes et récupère archives, documents (autographes de Robespierre ou de Fouquier-Tinville, entre autres) et objets. Tout ce qui se rapporte à la peine capitale et aux supplices depuis le Moyen Age. Non par esprit morbide : «Je voulais démontrer que, paradoxalement, la guillotine a été inventée dans un souci d'humanité et d'égalité. Sous l'Ancien Régime, le raffinement et la diversité des tortures infligées (la ''question'') étaient incroyables ! Atroce. En outre, il y avait inégalité devant la mort : la décapitation était réservée aux aristocrates. Les roturiers étaient pendus, brûlés ou roués. La Révolution a voulu mettre tout le monde au même niveau devant la mort.»

Après avoir tenu un éphémère musée de la Justice et du Châtiment (fermé faute de visiteurs en 1998) à Fontaine-de-Vaucluse, il se retrouve à la tête d'une imposante collection. Pour rien, se plaint-il : «J'ai un cancer, et mes jours sont comptés. Ma fille ne s'intéresse pas à l'Histoire. L'Etat ne veut pas entendre parler de ce passé. Que faire ? Vendre aux Américains ?» Ses deux perroquets ont beau siffloter La Marseillaise sur le balcon, c'est sans doute ce qui va se produire. Quant à Fernand Meyssonnier, il attend la mort, cette mort qu'il a si souvent administrée en tant que représentant officiel de la violence légale. «Je veux être incinéré, précise-t-il. On mettra les cendres dans le bronze, là-bas.» Sur un meuble, il désigne son propre buste. Et devant cette tête sans corps reposent ses mains, moulées dans le même alliage. Les mains du bourreau ? Réponse : «Non, les mains de la Justice.»

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